Comment les espaces publics sont occupés par les femmes ? Comment occupent-elles cet espace ? Les villes seraient-elles genrées ? Comment les femmes expriment-elles leur volonté de prendre possession de la ville ?

Je pense que cela commence dans un endroit public que tout enfant côtoie : la cours de récréation d’une école.
Vous avez pu vous en apercevoir vous-même à l’école. Les garçons occupent l’essentiel de la cour en jouant au foot. Quant aux filles, elles sont obligées de composer avec le reste d’espace que leur laisse les garçons.
Ce constat de l’occupation d’un lieu dans une cours de récréation d’école révèle la place que la société réserve aux garçons et aux filles et cela dès leur plus jeune âge.
Nous pouvons constater que ce manque d’égalité se retrouve dans les infrastructures publiques des villes.
Des villes genrées
La géographe féministe Jane Darke a écrit : "Nos villes sont un patriarcat écrit dans la pierre, la brique, le verre et le béton". En effet, les villes sont construites pour des hommes, des femmes, des enfants, des personnes en situation d’handicaps, des personnages âgées… pourtant ce sont presque exclusivement des hommes qui les conçoivent.
A l’origine, les villes ont été conçues pour des hommes riches et ayant du temps pour les loisirs et pour flâner. Pourtant, suite à de nombreuses études, ce sont les femmes qui se déplacent le plus dans les villes. Cela est dû au fait que celles-ci partagent leur temps entre le travail et les obligations familiales (s’occuper des enfants, faire les courses…) et donc elles sont plus amenées à sortir. Au contraire les hommes ont plutôt tendance à utiliser la voiture individuelle.
Ces enquêtes montrent que la ville est souvent créée pour de citoyens ayant de l’argent, or les femmes en ont moins. D’une part parce que les hommes en gagnent plus ; et aussi parce qu’ils le partagent moins.
Il faut noter qu’à la tête des collectivités, le décideur est souvent un homme ; seulement 16% des maires de France élus en 2014 et 8% des présidents de Conseil Départemental élus en 2015 sont des femmes.
Lespaces et les équipements de loisirs sont souvent pensés pour les hommes. Ainsi, 2/3 des espaces sportifs en libre-service (skate park, terrain de foot…) dans une ville sont utilisés par des hommes.
Suite à une enquête, il en est ressorti que les scooters en sharing (partage) de la ville de Paris (Cityscoot) sont à 90% utilisés par des hommes. Cela serait dû au fait que le poids du véhicule est trop important pour elles ; en conclusion elles ne se sentent pas à l’aise, elles ont peur de se faire mal et elles se tournent vers un autre moyen de locomotion.

La ville du futur sera-t-elle plus paritaire ?
Certaines Villes commencent sérieusement à se pencher sur le sujet. Comme Toronto, où via le programme « audits de sécurité » les femmes peuvent signaler les lieux où elles ne se sentent pas en sécurité afin que la ville les repère et améliore leur fréquentation en modifiant l’éclairage, en s'équipant de trottoirs plus larges et de rambardes de sécurité…. Ce système de signalement, a également été mis en place dans la ville de Vienne et cela a permis de réduire l’anxiété des femmes.
Nous pouvons également constater qu’à Vienne, des feux piétons arborant des couples gays et hétérosexuels au lieu de l’habituel petit bonhomme solitaire ont été mis en place.
A Barcelone, le projet "Superblocs" a donné la parole aux femmes sur ce qu’elles voulaient et ce dont elles avaient besoin en ville. Il semble en effet que les femmes (plus que les hommes) considèrent les bancs comme partie prenante de la mobilité. Ils sont essentiels pour les personnes à mobilité réduite, les parents ou les éducateurs, et les personnes âgées. Il faut noter que 75% de leurs accompagnants sont des femmes. Ainsi la ville a installé 500 bancs suite à cette enquête.
Les budgets genrés"
En 2015, une loi oblige les villes de plus de 20 000 habitants à mettre en place un audit sur les projets concernant l’égalité hommes femmes au niveau des politiques publiques. Cela a amené les villes à mettre en place des budgets genrés (budget de sensibilisation au genre) car aujourd’hui les enjeux pour un quotidien plus inclusif sont nombreux.
En ce qui concerne la mobilité, des laboratoires de recherches ont vu le jour comme TInnGo ou le bureau d'étude « genre et ville » afin de mettre en lumière ces inégalités présentes dans les transports à travers différents travaux et enquêtes ; comme le dernier projet Diamond de Femmes et transport dont vous pouvez voir un récapitulatif ici
En effet, plusieurs collectivités ont compris les enjeux et commencent à mettre en place des initiatives de plus en plus importantes. Cela permet d’améliorer notre "vivre ensemble". Cela peut passer, par la technologie qui permet de signaler en temps réel un dysfonctionnement dans une ville, par la communication qui permet de mettre en lumière cette inégalité et également par des enquêtes afin de mieux identifier les problèmes. Ce type de budget est toujours combiné à des actions et des dispositifs transversaux.

L’égalité hommes/femmes passe également par les infrastructures et les villes dans lesquelles nous vivons car ce sont des espaces de notre quotidien. Ces villes genrées sont en corrélation indirecte avec les actes sexistes que les femmes subissent dans la rue et dans les transports en communs.
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